Le fait de sentir mon corps fatigué, gonflé, mou et inefficace obscurcissait mes pensées, amoindrissait ma joie de vivre, brouillait ma confiance en moi. Autant de désagréments qui finissaient par me rendre irritable et abaissaient considérablement ma capacité de travail (surtout mon imagination et ma motivation).
Mais que faire ? Les psy, j'avais donné. Les cours de barre fitness qui m'avaient tant fait de bien à Vancouver étaient dispensés à l'autre bout de la ville. J'étais un peu perdue...
Jusqu'au jour où, en sortant de la crèche de Charles, je remarquai une enseigne qui m'intrigua : "KX Yorkville : gym/clinic". Après m'être renseignée via leur site internet, je décidai, séduite par leur approche de la pratique sportive, de prendre rendez-vous pour un entretien. Pendant une heure, nous y parlâmes vitamines, carences, alignement du corps, importance des protéines, masse musculaire... J'avais l'impression d'être enfin face à quelqu'un qui pouvait m'aider à me faire me sentir forte et fière de mon corps.
Nous décidâmes alors de partir sur un programme de trois mois, à raison de 3 séances par semaine avec un coach personnel. L'objectif étant de :
Me redonner confiance en moi.
Sentir mon corps performant.
Supprimer ma fatigue.
Apaiser mon sommeil.
Inverser la proportion masse grasse/masse musculaire.
Une fois la masse musculaire acquise, la travailler en mode "danseur" plutôt que "crossfitter".
Diminuer ma rétention d'eau.
Point de vue alimentation, j'ai refusé dès le départ toute contrainte restrictive (je n'ai pas de poids à perdre et la restriction me mène tout droit à la compulsion). Pas de restrictions donc, mais des ajustements. Je devais consommer des protéines animales à chaque repas (viande rouge matin et midi, viande blanche le soir). Dans l'idéal, on me conseilla de déguster au saut du lit un steak de bison nourri à l'herbe, de me supplémenter en oméga 3, zinc et magnésium et de boire de l'eau filtrée.
Rien d'insurmontable a priori. Après quelques jours, j'ai néanmoins fini par renoncer aux agapes carnées matinales, que j'ai remplacées par des protéines en poudre plus digestes…
Lors de ma première séance, mon coach me plaça sur les épaules une barre chargée d'haltères et me demanda d'effectuer un squat. Impossible de bouger. Conciliant, il retira les charges. Mais le poids de la barre nue était encore trop important pour moi. Finalement, c'est "à vide" que je parvins à effectuer mon premier squat. Je ne pensais pas être aussi faible…
Tout au long de la séance, je fus confrontée à un corps tremblant sous l'effort, incapable de résister à son propre poids. Tout était terriblement éprouvant. À la fin, exténuée et les larmes aux yeux, je dis au coach que je me sentais nullissime et qu'il valait mieux tout arrêter. Il me sourit et me dit que cette séance était mon point de départ et qu'il fallait que je m'en serve de référence afin de pouvoir juger de mes progrès futurs.
Quelques semaines plus tard, j'effectuais fièrement mes squats avec 6 kilos de chaque côté et tenais 45 secondes les pieds à un mètre du sol le haut du buste collé à une barre fixe. Je me sentais forte. Une force faite de volonté, d'abnégation et de muscles, une force dans laquelle je savais que j'allais pouvoir puiser au moment T, une force correspondant à mon état d'esprit.
Mon corps lui aussi avait changé. Je n'avais pas minci, mais je m'étais dessinée. Mon ventre était beaucoup plus plat, mes fesses remontées, mes bras moins mous. Comme si un sculpteur avait dégagé de la glaise le tracé de certains muscles. Moi qui, depuis l'anorexie de mes 15 ans, avais comme objectif morphologique une silhouette fine dépourvue de muscles, je me mettais à apprécier un corps vivant, conçu pour le mouvement. Un corps "outils" plus qu'un corps "porte-manteau".
Depuis, je porte Charles beaucoup plus facilement, je bouge mieux, mon sommeil s'est considérablement amélioré, je suis bien moins fatiguée. Et surtout, les jours où mon enveloppe corporelle se mue en fardeau se sont raréfiés. Trois fois par semaine, j'observe dans les grandes glaces du studio de gym ce corps dont j'ai si longtemps fui le reflet, je le vois fonctionner, et… il m'épate. Jamais je ne l'aurais cru capable d'une telle endurance.
Deux mois après ma première séance, j'ai acquis l'intime conviction que demander "l'impossible" à son corps, le pousser, le challenger afin qu'il nous surprenne et nous fasse prendre conscience de ses capacités est un excellent moyen de booster l'estime de soi...
Par Lise Huret, le 29 décembre 2016
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