Chronique #77 : Éloge du confort
En matière d'habillement, la notion de confort m'a longtemps laissée indifférente. Il faut dire que je considérais alors que la raison d'être des vêtements était davantage de permettre quelques illusions d'optique que de rendre la vie plus douce…
Pendant des années, j'ai ainsi exclusivement porté des talons hauts (afin d'allonger ma silhouette au maximum). À la ville comme à la campagne, à la fac comme à la maison, en vacances comme à la bibliothèque, je me perchais invariablement sur 8 bons centimètres (au minimum). Et tant pis si mal au dos et inconfort surgissaient fatalement en fin de journée...Il était par ailleurs pour moi hors de propos de baisser la garde une fois rentrée chez moi. Jusqu'au coucher, je conservais ainsi ma tenue du jour, mon slim trop serré, mes talons bruyants... Le matin, il m'apparaissait inenvisageable de déambuler en pyjama : à peine levée, je filais sous la douche afin de sauter au plus vite dans mes vêtements et d'enfiler mes chaussures. Le concept même de "homewear" n'avait à mes yeux aucun attrait et était synonyme de relâchement et de perte de contrôle.
Puis nous avons déménagé à Vancouver et mes certitudes sur le sujet se sont fissurées. Entre cet ami/voisin de 60 ans qui, me voyant déambuler en skinny et Doc Martens dans notre appartement, me dit un jour : "Lise, you need to be comfortable at home", les hordes de filles osant descendre chercher leur café en bas de pyjama et le "culte au confort" ambiant, je finis par me dire que je me privais peut-être inutilement de quelque chose de positif.
Petit à petit, je me mis donc à me renseigner sur l'offre "homewear", avec pour objectif de me trouver un uniforme d'intérieur à la fois douillet et "esthétique". Je voulais me lover dans de belles matières, jouer sur le contraste entre la délicatesse d'un caraco et le moelleux d'une grosse maille… Bref, j'avais enfin compris qu'il pouvait être bénéfique de dissocier garde-robe urbaine et vestiaire d'intérieur, ce dernier ayant l'indéniable avantage d'être pensé non pas pour plaire aux autres, mais plutôt pour offrir au corps une parenthèse ouatée.
Sweatpants, débardeurs ultra fins, pulls amples, courts et tout doux firent ainsi leur entrée dans mon existence, donnant naissance à un rituel vestimentaire qui depuis me procure un indéniable plaisir : chaque jour, je m'habille comme si j'étais à Paris (ou presque), nous déjeunons à l'extérieur, travaillons deux heures dans un café, allons chercher Charles à la crèche et rentrons. J'abandonne alors avec joie mes vêtements de citadine pour enfiler ma panoplie "doudou", noue mes cheveux en chignon haut, enlève le peu de mascara qui me reste sur les cils, allume quelques bougies et commence avec gourmandise la fin de journée.
Résultat : la maison est devenue synonyme de bulle confortable, de sas de sérénité, où la seule priorité est de se sentir bien. Sans parler du fait que contrairement à ce que je craignais, Julien adore cette mutation quotidienne. Il faut dire que de la sensation de confort naît une gestuelle légère, vive, naturelle et libérée, de toute évidence bien plus flatteuse que n'importe quel talon aiguille de 10 cm...
PS : Je viens d'acheter son premier "sweatpants" à Charles, qui depuis quelque temps réclamait de pouvoir faire "comme maman"... Il ne reste plus que Julien à convertir !
Par Lise Huret, le 10 novembre 2016
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