Ex-must have : que sont-ils devenus ?
Ils ont attisé le désir, saturé le paysage street-style, généré des milliers de copies et mené parfois jusqu'à l'hystérie… Après avoir eu un impact conséquent aussi bien sur l'industrie de la mode que sur la libido fashion des consommateurs, que sont devenus les must have d'hier ?
Les boucles d'oreilles "Mise en Dior"
À l'occasion de la collection Dior Pre-Fall 2013-2014, Camille Miceli dévoile les boucles d'oreilles "Mise en Dior" (voir ici et là). Leur minimalisme tribal piqué d'asymétrie nacrée émoustille immédiatement les papilles des trend-setteuses.
Le buzz
Généreusement distribuées aux rédactrices de mode, actrices, influenceuses et autres personnes susceptibles de participer à leur mise en orbite, les Mise en Dior sont rapidement vues et photographiées aux lobes de celles qui comptent (voir ici, ici, ici et là). Portées tour à tour en mono-boucle chez les plus pointues ou comme des boucles d'oreilles classiques chez les plus sages, elles deviennent le symbole d'un chic à la fois raffiné et audacieux. Celles qui s'en sont vues offrir par la griffe n'hésitent par ailleurs pas à se les échanger afin de dépareiller les perles et de créer ainsi des modèles fantaisies inédits.
Aujourd'hui
Désormais appelées "Tribales", ces boucles d'oreilles ont acquis le statut de classique au sein de l'offre Dior. Un classique qui joue chaque saison avec différentes teintes et textures, et peut même se parer de breloques. Bien qu'énormément copiées, elles conservent - dans leur forme la plus épurée - une désirabilité non négligeable, à condition de les porter sur une seule oreille et d'éviter de les insérer au sein d'un total look Dior. On note par ailleurs que leur prix a sensiblement augmenté, passant de 230 euros en 2013 à 390 euros actuellement.
Le sweat "tigre" Kenzo
Deux ans après leur arrivée à la direction de Kenzo (où ils succèdent à Antonio Marras), Humberto Leon and Carol Lim - également fondateurs du concept store Opening Ceremony - livrent au sein de leur collection A/H 2012 un sweat-shirt frappé d'une tête de tigre dont ils ont déniché le dessin au sein des archives de la maison. Les équipes de la marque ont beau être dubitatives à l'idée de proposer une pièce 100% streetwear, le duo n'en est pas moins convaincu que celle-ci a toute sa place au sein de leur collection et possède toutes les qualités requises pour séduire massivement les fashionistas.
Le buzz
En 2013, blogueurs et must have règnent en maître au sein de la sphère fashion, les premiers promouvant les seconds et les seconds offrant de la légitimité aux premiers (le tout étant doctement documenté par les photographes street-style). Dans ce contexte où la courbe de désirabilité d'un produit est directement liée à la récurrence de ses apparitions sur les clichés de Tommy Ton, les marques développent une politique de "gifting" agressive et inondent de leurs produits phares celles et ceux susceptibles de leur offrir de la visibilité.
C'est ainsi que l'on ne compte bientôt plus les influenceuses (rédactrice de mode en vue, blogueuses…) arborant le sweat Kenzo. L'effet est viral. Le sweat se retrouve en rupture de stock. Le désir est attisé. Il devient un objet de convoitise. La saison suivante, il est partout. Il conservera son aura branchée pendant quelques années.
Aujourd'hui
Après avoir acquis dans les années 2018/2019 le douloureux statut de pièce "has been", le sweat shirt Kenzo retrouve une nouvelle légitimité, plus confidentielle, certes moins "masstige" mais néanmoins presque aussi impactante que par le passé. Il faut dire que ces quelques dizaines de cm2 de molleton condensent à eux seuls toute la synergie des années 2010, entre désir de luxe abordable, nouvelles règles en matière d'influence et toute puissance du street-style. Après être passé de "must have" à "has been", le sweat shirt Kenzo est ainsi devenu un produit collector.
Les Stan Smith blanches
Créée en 1963 pour le joueur de tennis Robert Haillet, celle que l'on nomme dans un premier temps la "Adidas Robert Haillet" mêle système d'aération novateur et protection renforcée du tendon d'Achille. Rebaptisée "Stan Smith" en 1973 lorsque l'équipementier devient le sponsor officiel du tennisman éponyme, elle se voit rapidement adoptée par toutes les strates de la société, avant d'être délaissée dans les années 80. À nouveau plébiscitée dans les années 90, elle se retrouve mise à l'écart pour la seconde fois dans les années 2000…
Le buzz
Lorsqu'en 2011, Phoebe Philo apparaît chaussée de Stan Smith à la fin du défilé Céline A/H 2012, la créatrice parvient à faire oublier en quelques secondes qu'il existe d'autres paires de baskets. Sa dégaine à la simplicité acérée nimbe en effet les Stan Smith d'une désirabilité inédite. Si l'on ajoute à cela l'arrêt de leur production quelques mois plus tard, on obtient une équation magique sur le plan marketing : convoitise + frustration. Il suffit en effet de laisser le manque agir quelques mois, puis de remettre soudainement ledit produit sur le marché pour assister à une envolée des ventes.
C'est ainsi qu'à partir de 2013, la Stan Smith se met à régner sans partage dans le coeur des collégiennes, fashionistas, journalistes, lycéennes et autres rédactrices de mode. Elle devient un objet mode à part entière. Elle instaure également un nouveau dress code où le port de la basket blanche au sein d'une tenue citadine, chic, voire sophistiquée n'est plus une faute de goût, bien au contraire.
Elle est par ailleurs copiée par certaines griffes branchées (Saint Laurent, Isabel Marant…) qui reprennent sa dégaine et remplacent simplement le trèfle par leur logo. Elle s'imposera bientôt comme un incontournable des looks en vogue des années 2013/14/15 (voir ici, ici, ici, ici et là)...
Aujourd'hui
La folie acheteuse ayant fait grimper de plus de 400% la demande de Stan Smith entre 2013 et 2015 s'est atténuée. fait en effet les frais d'une intense surexposition ayant mené à une indigestion tout aussi massive. Elle est entrée dans une phase d'hibernation où seuls ses aficionados d'avant le buzz de 2013 continuent de l'arborer. Et si elle ne chausse désormais plus 70% des filles que l'on croise dans la rue, force est de constater qu'elle nous a laissé en héritage un usage décomplexé de la basket blanche…
Par Lise Huret, le 08 novembre 2022
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Aujourd'hui je ne peux plus les voir, c'est fou comme la société arrive à nous modeler.
En ce qui concerne les boucles Dior ils feraient mieux de les arrêter car dans n'importe quelle boutique de bijoux fantaisie il y en a maintenant.
J'aurais ajouté à ta liste aussi Lise, les baskets compensées Isabel Marant.
Peut être qu'un jour nous regretterons aussi amèrement nos pièces must have d'aujourd'hui, enfin non c'est même certains. Voilà pourquoi maintenant je ne m'y intéresse quasiment plus à ces pièces faisant le buzz. L'âge nous fait évoluer et heureusement!