Agyness Deyn - Tee-shirt Henry HollandDéfilé Luella 2008Balmain version Decarnin

Quand la "roue fashion" tourne...

Agissant comme une piqûre de rappel, la chute en 2016 du chiffre d'affaires de Prada est le signe que rien n'est immuable au sein du petit monde de la mode et que des créateurs/griffes considérés comme incontournables peuvent rapidement perdre leur bonne étoile. Passage en revue de tous ceux qui ont su faire battre notre pouls, avant de perdre - brusquement ou graduellement - leur adéquation avec l'air du temps...
Agyness Deyn - Tee-shirt Henry Holland

Les tee-shirts à slogans d'Henry Holland


2006 - Autodidacte anglais à la dégaine fluokids, Henry Holland est bien décidé à se faire une place au sein du paysage londonien. Il imagine pour cela une série de tee-shirts oversize aux slogans dignes d'une groupie fashion, tels que "I'll Tell You Who's Boss, Kate Moss", "Do Me Daily, Christopher Bailey" ou encore "Cause Me Pain, Hedi Slimane". Il les fait notamment porter par son amie Agyness Deyn (qui sera bientôt La mannequin du moment) et attire l'attention de la presse et des "it" girls. Frais, culottés et joyeusement pop, les tee-shirts d'Henry Holland séduisent alors tous azimuts.
2017 - Si Henry Holland n'a pas - contrairement à Agyness Deyn - totalement disparu des radars, il n'est pas parvenu à faire renaître l'euphorie suscitée dix ans plus tôt par ses tee-shirts potaches.

Balenciaga version Ghesquière


2007 - En février, Nicolas Ghesquière présente une collection télescopant énergie urbaine, graphismes folk et détails preppy qui galvanise littéralement les fashionistas. Mêlant jodphur camel, blazer cintré, keffief revisité et sandales Lego imaginées par Pierre Hardy, ses silhouettes deviennent instantanément la sensation de la saison. En quelques semaines, Nicolas Ghesquière devient le chouchou des rédactrices de mode et autres fashionistas, qui attendent désormais ses collections avec impatience. Des collections qui n'auront d'ailleurs rapidement plus grand-chose à voir avec son défilé automne/hiver 2007-2008 et qui, à défaut d'être facilement portables, se révéleront être des trésors d'innovation textile et d'audace stylistique.
2017 - Après cinq saisons passées sous la houlette d'Alexander Wang, c'est désormais au tour de Demna Gvasalia d'imaginer les collections Balenciaga. L'aura infiniment hype du créateur géorgien - Gvasalia est le fondateur de la griffe Vêtements - ressurgit sur la griffe, qui bénéficie du coup d'une forte exposition tant chez les influenceurs qu'au sein de la presse. De son côté, Nicolas Ghesquière officie désormais chez Louis Vuitton.
Défilé Luella 2008

Les robes de nerd de Luella


2007 - Avec sa collection printemps/été 2008, la créatrice Luella Bartley (ex-rédactrice de mode chez Vogue) rentre dans le cercle très fermé des designers anglais faisant tourner la tête de la fashion sphère. Son nom est alors sur toutes les lèvres. Il faut dire que son vestiaire pour "nerdy girl" où se mêlent influences fifties et énergie punk (voir ici, ici et ) marie avec brio  twist créatif et dimension commerciale. Une alchimie qui attire l'attention des acheteurs, grave le nom de Luella dans le coeur des fashionistas et excite les magazines.
2017 - Si "Luella" n'est plus depuis 2010 (les investisseurs ayant décidé de ne plus financer la griffe), la créativité joyeusement "grunge acidulé" de Mrs Bartley continue néanmoins d'infuser la mode. Pendant quatre ans, celle-ci fut ainsi - avec Katie Hillier - à la tête de la griffe Marc by Marc Jacobs. Le binôme lancera ensuite sa propre marque "Hillier Bartley", que Luella Bartley gère aujourd'hui en parallèle de ses nouvelles fonctions au sein de l'équipe de Raf Simons chez Calvin Klein.

Les robes de Christopher Kane


2006 - Jeune diplomé de la Saint Martins School, Christopher Kane - qui peut alors se targuer d'avoir tapé dans l'oeil de Donatella Versace - livre une première collection uniquement composée de robes semblant tout droit sorties de l'esprit d'un Azzedine Alaïa sous LSD (voir ici, ici et ). Les rédactrices tombent immédiatement amoureuses de ce garçon audacieux, dont la muse n'est autre que sa propre soeur. Une histoire d'amour au départ fusionnelle qui se muera au fil des années en amitié platonique, les partis pris esthético-conceptuels du designer n'étant pas toujours appréciés.
2017 - Si Christopher Kane fait incontestablement partie des poids lourds de la fashion week londonienne, il est désormais plus rare de voir ses créations se transformer en must have, comme l'avaient fait en 2009 les pièces de sa série "Gorilla" (voir ici, ici et ).
Balmain version Decarnin

Les années Decarnin chez Balmain


2006 - Sous la houlette de Christophe Decarnin (un ténébreux styliste alors inconnu du grand public), Balmain s'impose rapidement comme une griffe suavement rock, faussement sulfureuse et totalement incontournable. À coup de strass, de coton destroyed hors de prix, de blazer à épaulettes et de micro robes ultra sexy, Christophe Decarnin imagine une nouvelle silhouette pour fashionista filiforme qui se mue rapidement en Graal trendy (notamment grâce à l'influence du Vogue Paris, dont les pages grouillent de produits Balmain). Son style devient par ailleurs le mètre étalon de la fast fashion, qui n'hésite pas à le copier à outrance. De son côté, la très regardée Emmanuelle Alt (styliste chez Vogue Paris et consultante pour Balmain) fait des blazers de la griffe une des principales composantes de son uniforme. En 2011, la balmainmania s'arrête cependant brutalement suite à un violent burn-out du créateur.
2017 - Sous l'influence de son nouveau directeur artistique Olivier Rousteing, Balmain a une fois de plus mué. Et si les collections du jeune homme se voient régulièrement plébiscitées par la famille Kardashian, leur impact n'a plus grand-chose à voir avec celui des années Decarnin.

2009-2015 : le règne incontesté de Céline


2009 - Pour sa première collection en tant que directrice artistique de la maison Céline, Phoebe Philo livre un vestiaire estival précis et épuré, qui voit le sportswear cher à la griffe française gagner en force. Sous ses doigts, la notion de minimalisme devient alors à nouveau désirable et donne aux femmes des envies de garde-robe powerful à l'élégance cérébrale. Ajoutez à cela des sacs à main trustant saison après saison les premières places du classement des "it" bags ainsi qu'un plébiscite unanime du trio gagnant rédactrice de mode/acheteurs/influenceuses et vous obtiendrez ce que l'on peut appeler aujourd'hui avec un peu de recul "l'ère Céline". Une période qui durera 6 ans et que l'on avait fini par croire éternelle. Pourtant, depuis 2015, l'impact de la griffe sur les tendances va en s'étiolant.
2017 - La roue a tourné et les créations de Phoebe Philo correspondent aujourd'hui moins à l'air du temps, le minimalisme ambiant ayant cédé la place au "baroque Guccien" et au "normcore Vêtements".
Par Lise Huret, le 20 avril 2017
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12 commentaires
Tous les commentaires
RouletabilleIl y a 7 ans
Très intéressante analyse, qui prend le temps de la réflexion et du retour en arrière, alors que la mode veut toujours se vivre en instantané. On observe le même phénomène de cycles avec les marques plus abordables : exemple Benetton grand provocateur des années 80 ou 90 devenue une marque passablement mémère ....
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....Il y a 7 ans
J'adore le titre!
Henry Holland: je continue a suivre son travail et pense qu'il pourrait bien prendre la suite de Moschino après le départ de Jeremy Scott. Ces t-shirts étaient littéralement copiés partout! So 2006/07.

Balenciaga by Ghesquiere: La marque ultime des années 2000. Je regarde souvent avec nostalgie les anciens défilés. La musique extraordinaire de Michel Gaubert, le casting...Tout était parfait. Je me souviens même des boutiques qui étaient assez funs. Certes, aujourd'hui Balenciaga est toujours hype mais il manque quand même ce supplément d’âme qu'a su insuffler Ghesquiere. C'est assez rare mais aucun de ses défilés de 2001 a 2013 ne fait daté. C'est d'une modernité terrible et c'est vraiment la marque d'un génie.

Christopher Kane: Ses collections semblent moins intéresser et sans l'exposition médiatique que lui apportait Donatella, sa place dans la mode actuelle semble infime. C'est très londonien comme succès apparemment mais en effet, même les influenceuses ne semblent pas adhérer. Dire qu'il était pressenti pour reprendre Versace...

Balmain par Decarnin! Si bon et si court..
C'était quand même le dernier éclat de la décennie. Les t-shirts et les jeans à 1000euros sold-out partout! La folie en fait...
Emmanuelle Alt, styliste la plus influente du monde carrement...
Ils ont le fait le bonheur de Zara & Topshop!

Celine: Je pense que Philo est très intelligente. Elle suit un peu les traces de Ghesquiere. Ces collections sont peut-être moins accessibles aujourd'hui mais elles deviennent de ce fait assez intemporelles. Avant, porter du Céline s'inscrivait dans une tendance. Aujourd'hui, ça exprime vraiment un point de vue. Et puis, à qui doit-on la tendance "Chemise large et pantalon cropped avec sneakers"?

Concernant Prada, ils payent surement le prix d'une stratégie floue. C'est décrit par les professionnels de la mode comme la chose la plus influente et progressiste mais arrivé en boutique, c'est assez bourgeois, ennuyeux et (un peu trop)cher.
Et puis, ils ont tellement poussés le côté intellectuel que ça en ait devenu prétentieux malheureusement...

Je rajouterai à cette liste YSL à l'époque par Pilati, Lanvin par Elbaz (c'était le début du buzz), Dolce & Gabbana et Dior Homme par Hedi Slimane qui excitait aussi bien les hommes que les femmes...

Finalement, une chose reste immuable: Le succès de Karl chez Chanel...Enfin, il y a prescription vu qu'il a survécu à toutes les décennies. Je pense que personne n'aurait prédit qu'il soit encore la, contre vents et marées...
La roue tourne mais Karl reste!
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CarolineIl y a 7 ans
Il y a de vrais 'best of' des années 2000 qui restent, en effet, sans se démoder... Quant à Chanel, les gimmicks mode passent très très vite, mais la base étant très bourgeoise et classique, ça reste très portable pendant plusieurs décennies.
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WilliamIl y a 7 ans
Ghesquiere chez Balenciaga... Je crois qu'il y avait une liste d'attente pour l'achat de ces fameux blazers ! C'était de la folie cette collection...
J'en ai une autre qui me vient en tête lorsque je pense au duo "Balenciaga/Ghesquiere", plus minimaliste, volumes plus importants, casquettes d'équitation, bottes noires moulantes sur le mollet... (un de mes premiers souvenirs mode)...

Céline... Je ne sais même pas à quoi ressemble les collections actuelles ! Un gros emballement pour les premières années et puis plus rien...
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samIl y a 7 ans
Bein moi c'est Jacquemus et pour la chose contraire: je pensais qu'il allait finir par accéder à l'étage qui reflétait son talent ( niveau sous-sol, parking soutterain) mais miracle, il a appris à dessiner des fringues: je bave sur ses hauts maintenant!
https://lagarconne.com/collections/new-arrivals-cl...
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https://lagarconne.com/products/tjqlecss17-jacquem...
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emmanuelisIl y a 7 ans
Très bon ces parallèles ! Intéressants car applicables à l'infini ! On peut comparer les années Frida G. et Alessandro M. chez Gucci, la mutation soudaine de Jacquemus en créateur qui compte, Saint Laurent avant / après Slimane... etc etc. Tu devrais nous en faire plus souvent !! :)
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romaneIl y a 7 ans
Lily Cole, Agyness Deyn, Gemma Ward, Anja Rubik, Sasha Pivovarova, Raquel Zimmerman, Daria Werbowy, Coco Rocha, Lily Donaldson, Freja Beha, Irina Lazareanu, Jessica Stam (merci Vogue pour l'aide) ... Sont quasiment toutes "passées de mode" malgré leur potentiel infini (j'ai cru aperçevoir Sasha au détour d'un show IM, Lily faire la fête avec Gigi et une Daria émaciée quelque part dans un magazine, mais à part ça).

Comme quoi la fashion sphère n'est pas éternelle, et dire qu'à l'époque je pensais ces modèles indétrônables (j'avais 12 ans et je tenais un Skyblog spécial mannequin, oh mon dieu :D )
Rien que cet article me donne la sensation de fin d'une époque, haha ^^
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lisou38Il y a 7 ans
tout à fait d'accord avec toi même si à mon sens, les apparitions de Sasha ou Freja font toujours sensation ! et Anja Rubik est toujours bankable de part son affiliation avec Anthony Vacharello.
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ClémenceIl y a 7 ans
Je commente très rarement (voire jamais!) mais merci pour cet article et pour ce petit voyage dans le temps qui m'a rappelé pourquoi je suis tombée amoureuse de la mode il y a un peu plus de 10 ans maintenant. La collection Balenciaga PE2008 reste jusqu'à aujourd'hui l'un de mes défilés préférés... Ghesquières chez Balenciaga... la veste en cuir aux studs XXL... Balmain sous l'air Decarnin et ses sandales à strass (!) Céline et sa simplicité... Bref, merci! :) un vrai bonheur de revoir ces collections que l'on a tendance à vite oublier vu le rythme effréné dans lequel on vit maintenant.
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Lise (TDM)Il y a 7 ans
Ah cette collection Balenciaga... Elle m'avait fait un tel effet !
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TyphaineIl y a 6 ans
Un retour en arrière qui m'a plongé dans une nostalgie mode grandiose ! En revenant ici, par ailleurs, j'étais déjà prête. Maintenant, je me demande si c'est mon désintérêt pour la mode qui rend tout si fade aujourd'hui ou bien la qualité du milieu de moins en moins bonne et effervescente ! Un tel flashback donne envie de se poser la question !
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Lise (TDM)Il y a 6 ans
Je n'ai pas la réponse ;)
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