Il est vrai que le droit du travail au Bangladesh s'avère particulièrement "souple", à tel point que certains n'hésitent pas à parler d'esclavage moderne. Pour un salaire de misère, femmes et enfants sont en effet soumis à un rythme de production effréné (14h de travail par jour), dorment bien souvent sur place et travaillent dans des locaux insalubres et surpeuplés, ne respectant aucune norme de sécurité. Depuis 2005, on ne compte ainsi plus les victimes d'incendies ou d'effondrements d'ateliers de confection, comme celui qui provoqua le 24 avril dernier la mort de plus de 1000 ouvriers à Dacca, la capitale du pays. Une tragédie au très lourd bilan qui a cependant peu de chance de faire évoluer les choses, à en juger par les réactions des différentes parties concernées...
Entre une première ministre du Bangladesh qui tente de minimiser les faits (en expliquant qu'aucun pays n'est à l'abri de ce genre de catastrophes), une enseigne espagnole - Mango - qui cherche à se disculper (en déclarant ne faire fabriquer qu'une petite partie de sa production au Bangladesh) et le silence assourdissant des autres clients des ateliers de Dacca (Tex, C&A, le Bon Marché, Benetton, etc...), difficile de ne pas se dire que les intérêts financiers passent une nouvelle fois ici bien loin devant le respect de l'être humain.
Et si la société canadienne Loblaw - qui faisait régulièrement appel aux ateliers du Rana Plaza - vient de s'engager à prendre en considération "l'intégrité structurelle des installations lors des vérifications de ses fournisseurs" et à dépêcher des employés sur place afin de veiller quotidiennement au bon respect des normes, elle fait aujourd'hui figure d'exception. D'où cette question qui s'impose désormais à nous : comment en tant que consommateur contraindre les enseignes à adopter une démarche éthiquement responsable ?
Dans la pratique, si le boycott des enseignes sous-traitant leur production au Bangladesh a tout de la "fausse bonne idée" (celui-ci ne faisant qu'accroître la misère des ouvriers en les poussant à accepter un emploi pire que le précèdent, voire même à se prostituer), on pourrait par contre envisager la création d'un label indépendant veillant au respect d'une certaine éthique, à l'instar de ce qui se fait depuis plusieurs années dans le secteur de l'alimentation.
Une solution qui, si elle permettrait aux consommateurs d'avoir meilleure conscience, aux marques de soigner leur image et aux ouvriers de bénéficier de meilleures conditions de travail, s'accompagnerait inévitablement d'une hausse des prix. Reste donc à savoir si une fois l'émotion retombée, la consommatrice lambda sera prête à payer quelques euros de plus sa baby doll H&M...
Par Lise Huret, le 11 mai 2013
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