Sur les tapis rouges, il est devenu courant de voir une ou plusieurs actrices arborer fièrement telle ou telle robe vintage. Il faut dire que si jusqu'à encore récemment on ne jurait que par l'éclat de la nouveauté, l'action conjuguée de Didier Ludot et de Nicolas Hulot a fini par sensibiliser la modeuse au charme de l'ancien et à la nécessité de mettre un frein à sa boulimie fashion.
Consommer moins mais mieux - ou tout du moins acheter de manière réfléchie des pièces résistant aussi bien au temps qu'aux tendances - étant devenu le nouveau concept à la mode, l'offre écologiquement correcte s'est considérablement élargie, stylistes aguerries et griffes de luxe n'hésitant pas à damer le pion aux utopistes importateurs de pièces en toile de chanvre...
Délaissant la fibre de bambou, ces dernières ont entrepris de recycler matières insolites ou précieuses, tout en tirant parti de l'artisanat d'exception propre à l'industrie du luxe. C'est ainsi que depuis 2008, Ilaria Venturini Fendi et sa marque de sacs patchwork "Carmina Campus" font le bonheur des fashionistas fans d'Al Gore, tandis que la ligne ethnique aux accents couture d'Eva Zingoni conjugue écologie et élégance.
Formée au Studio Berçot puis à l'IFM, Eva Zingoni entame sa carrière en décryptant l'air du temps pour l'une des chasseuses de tendances les plus réputées : Li Edelkoort. Rien ne pouvait mieux convenir à cette jeune femme à la curiosité insatiable et aux pulsions de globe-trotteuse. Cela dit, la mode pure l'attirant de plus en plus, elle n'hésite pas à pousser la porte de Ralph Lauren, où elle fera le trait d'union entre les fournisseurs et la griffe. Elle finit enfin par poser ses valises chez Balenciaga, chez qui elle affûtera son oeil de styliste six années durant.
Au départ préposée au service des rééditions, Eva Zingoni se voit ensuite confier les missions VIP, qui l'amènent à faire le tour des palaces afin d'habiller au mieux les stars ayant jeté leur dévolu sur Balenciaga. Or, aussi féerique soit ce travail et aussi attachée soit-elle à la maison Balenciaga, la jeune femme n'en est pas moins tenaillée par l'envie de voler de ses propres ailes.
Repue de paillettes, de caprices mondains et de pièces à la gloire éclair, Zingoni choisit alors d'en prendre le total contre-pied. Après avoir flirté avec les impératifs du turn-over de la mode et la nécessité de créer la tendance, la pétillante Argentino-Italienne décide ainsi de concevoir une ligne de vêtements exclusivement cousue dans les fournitures inutilisées qui encombrent les ateliers des griffes haut de gamme une fois les collections terminées.
Si elle peut alors profiter de matières luxueuses, les couleurs parfois datées l'obligent à faire fi des tendances. Elle privilégie donc les coupes intemporelles - avec toujours autant d'à propos - et laisse les influences Balenciaga guider ses ciseaux. Naissent ainsi de subtiles petites robes et vestes oversize où se télescopent avec grâce mousseline et gros grain, mais aussi modernité de la coupe et citations sixties.
Héritière spirituelle du duo E2, Eva Zingoni parvient à conférer au recyclage une note précieuse. Cousues en toutes petites séries dans les règles de l'art, ses créations ont la rareté du luxe, l'élégance de l'intemporel et la fraîcheur de celles qui croient encore pouvoir changer le monde...
Comptez entre 95 et 550 euros pour une pièce
Site officiel : http://www.evazingoni.com/
En vente à l'Espace des Créateurs - 7 rue Commines - 75003 Paris
Par Lise Huret, le 22 juin 2010
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