Même si son style punk acidulé et terriblement british a su séduire quasi immédiatement la sphère mode, Luella Bartley n'était pas destinée à venir saluer à la fin du show. Elle est née à Stratford-upon-avon (tout comme Shakespeare) en 1974. Loin de Londres, elle mène une enfance de fille de divorcés, auprès d'une mère se débrouillant tant bien que mal pour boucler les fins de mois. Son père quant à lui vit dans le Devon, possède des chevaux et évolue dans un univers très éloigné de celui de sa fille. Cette dernière tentera longtemps de se faire accepter par ce père lointain, d'où plus tard le titre de ses défilés : "Daddy, I want a pony" ou "Daddy, who were the Clash ?"
Collégienne, Luella n'est ni une bête de mode, ni une élève modèle. Les garçons l'intéressent d'ailleurs plus que les livres de classe, mais elle ne fait pas partie des filles "cool" et aspire à s'évader. Sa venue sur Londres pour suivre des cours de journalisme de mode à la Saint Martins School va radicalement changer sa vie. Elle devient alors un véritable oiseau de nuit et refait le monde aux côtés de Katie Grand, Giles Deacon, Kate Moss ou encore Sadie Frost.
Lorsque le journal "The Evening Standard" lui propose un poste de journaliste, elle saisit sa chance au vol et quitte les bancs de la Saint Martins School. Elle affinera ensuite sa plume chez "Dazed and Confused", puis "The Face", avant d'atterrir au Vogue UK.
Au cours d'une soirée arrosée, son amie Katie Grand la met au défi de créer sa propre ligne de vêtement. Luella décide alors de la prendre au mot, et se met immédiatement au travail. Si certains s'étonnent de cette transition rapide et risquée, Luella réplique qu'elle restera toujours un designer un peu à part, couchant toujours par écrit la trame de sa collection avant de toucher aux matières, alors que les autres démarrent des tissus pour ensuite en tirer une histoire.
N'ayant guère les moyens de s'offrir une place sur les podiums de la fashion week, elle choisit de présenter sa première collection ("Daddy, I want a pony") dans l'appartement d'un ami. Cela n'empêche pas son style brit punk de soulever l'intérêt de la sphère mode, si bien que dès la saison suivante Luella obtient sa place sur les podiums londoniens…
Cette fois-ci, tous les éléments sont réunis pour que Bartley brûle les planches. Ses amies ont en effet rameuté le Tout-Londres à son défilé "Daddy, Who Are The Clash ?", qui propulse Luella au sommet de la coolitude hype. Elle décroche alors l'Award du Britain's Young Designer of the Year, puis s'envole vers Milan en 2001 afin de sortir de la confidentialité Londonienne. Elle ne trouve cependant pas ses marques sur le sol italien ; elle décide donc de tenter l'aventure de l'autre côté de l'Atlantique et pose ses valises à New York.
La fashion week new-yorkaise l'accueille alors à bras ouverts : lorsque Gisele Bündchen ouvre son premier défilé munie d'un sac Luella pour Mulberry, l'impact est immense. L'association du top modèle le plus convoité et d'un sac ayant tout du it bag focalise l'attention internationale sur la jeune styliste britannique.
Alors que Luella est plébiscitée de toute part, la venue de son premier enfant (avec son compagnon le photographe de mode David Sims) va quelque peu changer son existence. Fêtarde invétérée, insouciante et encore adolescente dans l'âme, elle est rappelée à la réalité lorsque son petit garçon d'à peine quelques semaines tombe de la table à langer. Les services sociaux s'en mêlent et la jeune mère prend conscience que le temps des responsabilités est bel et bien arrivé.
Cet accident amène la styliste à devenir vraiment mère, à suivre son instinct et finalement à se faire plus confiance. Son corps change, la brindille noctambule devient une femme aux courbes épanouies qui, portée par l'amour des siens, ose de plus en plus niveau stylistique. En 2003, elle développe une ligne d'accessoires financée par Club 21, qui croit au potentiel bankable de la jeune femme depuis le buzz du sac Gisèle. Peu après, les vêtements suivent et la licence Luella devient hautement rentable.
En 2006, elle ravit le coeur des fashionistas (et flatte leur portefeuille) en dessinant pour Target une mini collection, avant de remporter le Elle Style Awards' British Designer of the Year. L'année suivante, à l'occasion de la saison printemps-été 2008, Luella décide de revenir à Londres. Son retour est triomphal et s'accompagne de l'ouverture d'une boutique sur Brook Street.
C'est d'ailleurs avec cette présentation rock à souhait, surchargée d'imprimés liberty destroy et dopée à la sauce girly geek que Luella rafle définitivement la mise. Elle est l'événement de la saison, son style est reproduit dans la rue de New York à Tokyo en passant par Paris et le gotha des starlettes s'arrache ses robes de pom pom girl... Elle reçoit alors l'award du Designer of the Year du magazine Glamour puis développe ses points de vente à l'étranger. En parallèle, aussi fan de surf que son compagnon, Luella est sollicitée par O'Neil pour concevoir une mini ligne de vêtements sportswear.
En dépit d'être l'une des femmes les plus adulées du moment, elle privilégie sa vie de famille et apparaît désarmante de simplicité lors des interviews. Son style no make up et chevelure décoiffée est devenu sa marque de fabrique : Luella est une fille cool. Mère de trois enfants, elle partage son temps entre une résidence dans l'Highbury et une grande ferme en Cornouailles, où elle mène une vie saine basée sur des préceptes bio.
Celle qui est parvenue à mêler références british et fraîcheur décadente avec talent et subtilité tout en s'offrant un foyer digne de ce nom sait décidément plus que quiconque comment faire de son quotidien un vrai conte de fées…
Par Lise Huret, le 04 décembre 2008
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Très plaissant.