Emboîtant le pas aux Chanel et autres Louis Vuitton (qui ont depuis quelques saisons intégré la vidéo à leur palette marketing), Miu Miu se met elle aussi à accompagner ses traditionnelles présentations de mini films visant à apporter une nouvelle dimension à ses collections. Pour l'automne/hiver 2011-2012, c'est cette fois-ci sous la direction de l'Argentine Lucrecia Martel que les Miu Miu's girls s'ébattent, donnant naissance à des images aussi glamour que troublantes.
Au rythme d'une bande-son insolite ponctuée de voix suaves, celles-ci apparaissent hantant un paquebot fantôme de leurs silhouettes tantôt fébriles, tantôt alanguies. Dépourvues de visage (ce dernier se voyant systématiquement dissimulé soit par une masse de cheveux, soit par un jeu de caméra), les modèles se voient ici désignées sous forme de métonymies, via d'intenses focus sur leurs cils, ongles, dos et profils.
Oui mais voilà, à la fois ultra sophistiquées, sublimement manucurées, minutieusement coiffées et complètement désincarnées, ces poupées "hitchcockiennes sous acide" nous plongent dans une profonde perplexité. Car si le très léché "Muta" s'avère parfaitement mis en scène, sa finalité nous échappe...
En décidant de saturer son court métrage de signaux SM érotico-rétro-grinçants, Lucrecia Martel nous livre un essai arty qui ne manquera pas de séduire le microcosme hype, mais dont la signification risque fort d'échapper au plus grand nombre. À force de frayer avec une esthétique ultra décalée, Miu Miu prend le risque de creuser un fossé de plus en plus profond entre ses clientes et un univers parfois plus déconcertant que désirable.
Au final, si l'on est séduit par le charme acide de cette narration alambiquée ainsi que par la beauté des atours Miu Miu, on reste dubitatif quant à sa capacité à convaincre hors du cercle des initiés...
Par Lise Huret, le 23 juillet 2011
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